L’institution remet en question le bon usage des 4 mds€ de subventions qui bénéficient chaque année au secteur.
Le récent rapport de la Cour des comptes s’interroge sur la pertinence des aides consacrées à l’élevage bovin en France. C’est un rapport bien documenté de 80 pages. Le constat réalisé est le suivant : L’élevage bovin concerne plus d’un tiers des agriculteurs français et un tiers du territoire. Il permet de satisfaire une grande partie de la consommation alimentaire des français et même de dégager des excédents commerciaux sur les animaux vivants, les fromages et la poudre de lait. Mais c’est un secteur très subventionné. Les seules aides de la Pac dépassent les 4 milliards € (md€). La question soulevée concerne le bon usage de ces subventions.
La Cour des comptes relève que les subventions accordées aux exploitations spécialisées en élevage bovin sont plus élevées que la moyenne. Dans les 282 000 exploitations du Réseau comptable agricole (RICA), qui exclu les 100 000 exploitations qui réalisent moins de 25 000 € de chiffre d’affaires par an, les exploitations laitières reçoivent 37 000 €, celles spécialisées en élevage bovin 51 000 € et celles classées en bovins mixte 58 000 € en 2021 alors que la moyenne est de 34 000 €.
-30% de vaches en 50 ans
Pourtant, elle ne s’interroge pas, au vu des résultats de 2021 et 2022, sur la pertinence de conserver des aides directes sans relation avec les cours du marché. Cela fait de très nombreuses années que les Etats-Unis ont adopté un système d’aides contracycliques plus compréhensible pour l’opinion publique.
La critique de la Cour des comptes ne s’arrête pas au seul aspect budgétaire et de performance économique des filières concernées. Elle vise le problème de l’impact de ces ruminants sur la fabrication de méthane et l’engagement qu’a pris la France par rapport à l’environnement. Or, ce secteur a déjà réduit le cheptel français de vaches de 30 % en 50 ans. L’accélération brusque de cette réduction aurait pour effet de transformer les pâturages en boisement dans de nombreuses régions.
Un précédent dangereux
La Cour des comptes ajoute un autre argument, émis par les autorités de santé, celui de la nécessité de réduire la consommation de viande bovine afin de ne pas dépasser 300 g par semaine et par personne. Ne vaudrait-il pas mieux s’interroger sur le secteur fruits et légumes qui connaît un déficit croissant de plus de 7 md€ et qui nous rendrait dépendant d’une région espagnole concernée en première ligne par le réchauffement climatique ?
Par ailleurs, vouloir réduire la production française pour obliger à consommer moins de viande est un raisonnement aussi contestable que celui qui a présidé pour la médecine. Limiter le nombre des médecins n’a pas réduit les dépenses de santé. En agriculture, cela conduira aussitôt à une accélération des importations. Il s’agit là de préoccupations sociétales parfaitement légitimes qui ne sont pas habituelles dans les rapports de la Cour des comptes. On peut s’interroger sur les raisons qui ont poussé cette noble institution à créer un précédent en s’attaquant au secteur qui concerne près d’un agriculteur sur deux parmi les agriculteurs de métier. Il vaudrait mieux s’interroger sur la fiscalité des amortissements du matériel qui entraîne un certain suréquipement des exploitations agricoles.
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