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Environnement et agriculture : Avis de la Cour européenne

15/07/2020

Actus Agricoles

Les personnes morales de droit public peuvent être responsables des dommages environnementaux causés par des activités exercées dans l’intérêt de la collectivité en vertu d’un transfert légal de mission, telles que l’exploitation d’une station de pompage à des fins de drainage de surfaces agricoles.

Au cours des années 2006 à 2009, une partie de la péninsule d’Eiderstedt, située dans la partie ouest du Land de Schleswig-Holstein (Allemagne), a été classée « zone de protection » en raison notamment, de la présence de la guifette noire, un oiseau aquatique protégé. D’après le plan de gestion, la zone de protection de cette espèce reste majoritairement exploitée de manière traditionnelle en tant que région de pâturages sur de grandes surfaces. Pour être habitée et exploitée à des fins agricoles, la péninsule a besoin d’un drainage. Pour ce faire, un syndicat d’hydraulique et de bonification constitué sous la forme juridique d’une personne morale de droit public, exploite une station de pompage qui draine l’intégralité du territoire qu’il couvre. Ces opérations de pompage, qui ont pour effet de réduire le niveau de l’eau, relèvent de sa mission d’entretien des eaux de surface, qui lui a été confiée par la loi en tant qu’obligation de droit public.

Renvoi préjudiciel

Considérant que, par l’exploitation de cette station de pompage, le syndicat a causé des dommages environnementaux au détriment de la guifette noire, une association de protection de l’environnement, a introduit une demande de mesures de limitation et de réparation de ces dommages, qui a été rejetée. Au soutien de sa demande, l’association invoquait la législation allemande adoptée aux fins de la transposition de la directive 2004/35 sur la responsabilité environnementale. Cette directive établit un cadre de responsabilité environnementale en vue de prévenir et de réparer, notamment, les dommages environnementaux causés par des activités professionnelles aux espèces et habitats naturels visés notamment dans les directives « habitats » et « oiseaux ». La directive 2004/35 permet toutefois aux États membres de prévoir une exonération de responsabilité au profit des propriétaires et des exploitants lorsque les dommages causés aux espèces et aux habitats naturels résultent d’une « gestion normale » du site concerné. L’Allemagne a fait usage de cette faculté.

C’est dans ce contexte que la Cour administrative fédérale, saisie du rejet de la demande de l’association, a demandé à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), si et dans quelles conditions une activité telle que l’exploitation d’une station de pompage à des fins de drainage de surfaces agricoles peut être considérée comme ressortant de la « gestion normale d’un site ». Elle lui a aussi demandé de préciser si une telle activité peut être considérée comme une « activité professionnelle ».

L’avis de la CJUE s’impose

Dans son arrêt du 9 juillet 2020, la CJUE a relevé que la notion de « gestion normale d’un site » doit être comprise comme englobant toute mesure permettant une bonne administration ou organisation des sites abritant des espèces ou des habitats naturels protégés conforme, notamment, aux pratiques agricoles couramment admises. À cet égard, la CJUE a considéré que la gestion normale d’un site peut, notamment, inclure les activités agricoles exercées sur le site, y compris leurs compléments indispensables comme l’irrigation et le drainage, et, partant, l’exploitation d’une station de pompage. La Cour a en outre précisé qu’une juridiction appelée à apprécier le caractère normal ou non d’une mesure de gestion peut, lorsque les documents de gestion du site ne contiennent pas d’indications suffisantes, apprécier ces documents au regard des objectifs et obligations prévus dans les directives « habitats » et « oiseaux » ainsi qu’à l’aide des normes internes adoptées aux fins de la transposition de ces directives ou, à défaut, compatibles avec l’esprit et l’objectif desdites directives. Par ailleurs, la Cour a rappelé que la gestion normale d’un site peut également résulter d’une pratique antérieure exercée par les propriétaires ou les exploitants. La Cour a déclaré que cette règle couvre les mesures de gestion qui, à la date de survenance du dommage, ont été pratiquées pendant un laps de temps suffisamment long et sont généralement reconnues et établies pour pouvoir être considérées comme étant usuelles pour le site concerné, sous réserve cependant qu’elles ne remettent pas en cause la satisfaction des objectifs et obligations prévus dans les directives « habitats » et « oiseaux ».

S’agissant de la question de savoir si une activité exercée par une personne morale de droit public dans l’intérêt de la collectivité en vertu d’un transfert légal de mission, telle que l’exploitation d’une station de pompage à des fins de drainage des surfaces agricoles, peut constituer une « activité professionnelle » au sens de la directive 2004/35, la CJUE a confirmé que cette expression couvre l’ensemble des activités exercées dans un cadre professionnel, par opposition à un cadre purement personnel ou domestique, indépendamment du fait que ces activités aient ou non un rapport avec le marché ou un caractère concurrentiel.

RAPPEL : Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d'un litige dont elles sont saisies, d'interroger la Cour sur l'interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d'un acte de l’Union. La Cour ne tranche pas le litige national. Il appartient à la juridiction nationale de résoudre l'affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.

 

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