21.05.2025
Actus Agricoles

Loi Duplomb : entre simplification des normes et bras de fer agricole

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Laurent duplomb sénateur

Portée par le sénateur Laurent Duplomb, la loi ravive les tensions entre exigences de compétitivité et impératifs environnementaux. Soutenue les syndicats majoritaires, elle suscite une forte mobilisation pour hâter son adoption.

Alors que l’Assemblée nationale s’apprête à examiner la proposition de loi « pour une agriculture plus libre et compétitive », portée par le sénateur Les Républicains Laurent Duplomb, le monde agricole se mobilise de nouveau. Cette fois, il ne s’agit pas d’un rejet du texte — largement soutenu par les syndicats majoritaires — mais d’un appui ferme assorti d’une pression pour qu’il soit adopté sans affaiblissement et mis en œuvre rapidement. En toile de fond, le texte continue de susciter de vives critiques du côté des associations environnementales.

Un texte à la mesure des attentes de la FNSEA

La proposition de loi Duplomb, adoptée au Sénat en janvier 2025, vise à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ». Elle comprend des mesures de simplification administrative, un assouplissement des normes environnementales, une facilitation de l’accès à l’eau pour l’irrigation, et, de manière controversée, la possibilité de recourir à certains produits phytosanitaires interdits, comme les néonicotinoïdes (lire ci-dessous).

Le sénateur Duplomb, exploitant agricole en Haute-Loire et ancien président de la FDSEA 43, a conçu ce texte en lien direct avec les attentes du syndicat majoritaire. Il s’agit, selon lui, de donner aux agriculteurs les moyens de produire sans être entravés par une surenchère réglementaire, tout en maintenant des ambitions économiques.

Une mobilisation pour aller plus vite

La FNSEA et les Jeunes Agriculteurs soutiennent pleinement la loi, qui reprend une large part de leurs revendications historiques. Les récentes manifestations — comme celles du 19 mai dans les Hauts-de-France ou dans le Grand Est — visent non pas à contester le fond du texte, mais à maintenir la pression sur les députés afin d’éviter tout recul ou dilution lors de l’examen à l’Assemblée. « Il faut maintenant que les engagements se traduisent dans les faits. On ne veut pas d’un texte vidé de sa substance ou ralenti par des oppositions idéologiques », a déclaré Arnaud Rousseau, président de la FNSEA. Le syndicat réclame une adoption rapide et une application effective pour alléger au plus vite les contraintes pesant sur les exploitations.

La Coordination Rurale soutient également le texte mais regrette les modifications apportées en commission, qu’elle juge affaiblissantes, et appelle à un renforcement du projet pour répondre aux urgences économiques du secteur.

Les écologistes vent debout

Du côté des associations environnementales, la mobilisation est d’un tout autre ordre. France Nature Environnement, Générations Futures ou encore la LPO dénoncent un recul grave pour l’environnement, craignant un affaiblissement durable du cadre réglementaire. Elles pointent notamment l’assouplissement des zones de non-traitement (ZNT) à proximité des habitations, la réintroduction possible de substances interdites pour des raisons sanitaires ou environnementales ou encore, la facilitation de projets de stockage d’eau comme les « mégabassines ». Pour ces ONG, la loi « piétine les acquis de la transition écologique » et fait passer la compétitivité avant la santé publique et la biodiversité.

Un texte à haut potentiel de fracture

La Confédération paysanne, fidèle à sa ligne, voit dans la loi une offensive en faveur de l’agriculture industrielle, tandis que le MODEF regrette un manque d’ambition pour l’agriculture de proximité et les petits exploitants.

Dans ce climat tendu, la loi Duplomb cristallise une fracture persistante entre deux visions de l’agriculture : l’une tournée vers la performance économique et l’exportation, l’autre orientée vers la relocalisation, l’écologie et la résilience.

Parmi les principales mesures proposées :

  • Suppression de l’obligation de séparation entre la vente et le conseil pour les produits phytopharmaceutiques, permettant aux vendeurs de pesticides de conseiller les acheteurs.
  • Suppression de l’obligation du Certificat d’économie de pesticides lorsque les produits ont été achetés à l’étranger.
  • Création d’un Conseil d’orientation pour la protection des cultures, qui pourrait prioriser le travail sur les autorisations de mise sur le marché de l’ANSES en fonction des attentes des filières.
  • Réautorisation des promotions sur les pesticides, telles que les remises, rabais et ristournes, supprimées par la loi Egalim de 2018.
  • Autorisation de la pulvérisation par drone, sous certaines conditions, pour l’application de produits phytopharmaceutiques.
  • Rehaussement des seuils en-deçà desquels un élevage industriel peut s’agrandir sans réaliser d’évaluation environnementale et d’enquête publique, ainsi que la réduction de la procédure de consultation du public avant un agrandissement d’élevage.
  • Soutien à la construction de mégabassines d’irrigation, en déclarant ces projets d’intérêt général majeur, afin d’en renforcer la solidité juridique.
  • Réduction des zones humides protégées, par modification des critères d’éligibilité, notamment en restreignant la définition de la zone humide.
  • Réduction du nombre de représentants des usagers non économiques des comités de bassin, de 20 % à 10 %, et augmentation de celui des usagers économiques de 20 % à 30 %, ce qui porterait atteinte à la voix des usagers dans ces instances de concertations locales.
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