07.04.2025
Actus Agricoles

CIR : attention aux abus, l’administration alertée

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Le crédit d’impôt recherche (CIR), conçu pour stimuler l’innovation, fait l’objet d’un usage détourné et massif dans le secteur agricole

Le crédit d’impôt recherche (CIR), conçu pour stimuler l’innovation, fait l’objet d’un usage détourné et massif dans le secteur agricole, selon l’Ordre des experts-comptables.

D’après l’Ordre des experts-comptables et l’administration fiscale, un « usage tendancieux et massif » du crédit d’impôt recherche (CIR) se développe dans le secteur agricole.

Régi par l’article 244 quater B du Code général des impôts, le crédit recherche permet aux entreprises de bénéficier du remboursement de 30 % de leurs dépenses en recherche et développement (R&D), jusqu’à 100 millions d’euros, puis 5 % sur les sommes additionnelles. Il est ouvert aux entreprises ou sociétés des secteurs industriel, commercial ou agricole, quelle que soit leur taille.

Ce dispositif représente aujourd’hui pour l’Etat la dépense fiscale la plus élevée (7 milliards d’euros). Les secteurs agricole et agroalimentaire concentrent près de 4 % de cette enveloppe. Fait marquant : chez les agriculteurs imposés à l’IR, cette évolution constitue une croissance inattendue, avec 51 dossiers en 2021 contre 190 en 2022. Les chiffres 2023 et 2024 ne sont pas disponibles.

Ce phénomène est largement attribué à certains cabinets intermédiaires (Leyton, Findways, Guérin Organisation, etc.), réputés pour leurs pratiques commerciales agressives. En conséquence, l’administration centrale se montre désormais plus méfiante et plus exigeante. Les analyses sont approfondies, les délais d’instruction allongés.

Vigilance de mise

Le CIR version 2025, actuellement en attente de publication, devrait renforcer les critères d’éligibilité pour limiter les abus et les projets « non conformes à la loi ». Par exemple, des dossiers déposés portent sur l’expérimentation de couverts végétaux visant à améliorer la qualité des sols, réduire l’irrigation et les intrants chimiques. Or, les travaux d’expertise menés par le Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR) ont conclu que ces dépenses mobilisent un savoir-faire déjà existant et ne relèvent donc pas de la R&D, s’agissant de techniques anciennes et bien connues.

Pour être éligibles, les projets doivent suivre une véritable démarche scientifique, destinée à lever des verrous scientifiques ou techniques — c’est-à-dire répondre à des problèmes pour lesquels les connaissances disponibles ne suffisent pas.

Démarche scientifique

La mise en œuvre d’une démarche scientifique suppose que l’exploitant (ou le personnel qu’il emploie pour mener les recherches) soit capable de :

  • Identifier clairement le problème à résoudre ;
  • Étudier l’état des connaissances scientifiques et/ou techniques sur ce problème ;
  • Formuler des hypothèses pour y répondre ;
  • Décrire les travaux effectivement réalisés et analyser les résultats obtenus.

Cinq critères-clés permettent de s’assurer qu’on est bien dans une logique de recherche : nouveauté des résultats, créativité des hypothèses, incertitude sur les résultats, planification/budgétisation, et reproductibilité des travaux. Il convient donc d’éviter les descriptions vagues ou les objectifs trop généraux.

Personnel compétent

Les opérations de R&D doivent être réalisées par un personnel de recherche qualifié, titulaire au minimum d’un diplôme de niveau master ou équivalent, éventuellement assisté par des techniciens. Un agriculteur titulaire d’un BTS en gestion, n’ayant pas validé ses acquis dans le domaine de recherche invoqué, qui se lancerait dans des travaux de sélection génétique de cultures, ne pourrait pas être considéré comme responsable d’une activité de R&D — à moins d’avoir une expérience significative ou une formation continue spécifique dans ce domaine.

Sont également jugés incohérents, aux yeux de l’administration un agriculteur consacrant plus de 62 % de son temps à la R&D, sans salarié ni associé pour assurer les tâches courantes de l’exploitation, ou encore, une petite exploitation d’élevage bovin qui prétend mener des travaux de recherche sur l’autosuffisance du bétail, sans disposer de parcelles dédiées.

Renfort d'experts

Le MESR prévoit de renforcer son pool d’experts agricoles, qui ne sont actuellement que 20 sur 1 000 référencés, afin de répondre plus efficacement aux demandes de l’administration fiscale.

De son côté, la DGFIP a décidé de saisir systématiquement les DRARI (Délégués régionaux académiques à la recherche et à l’innovation) pour toute demande de CIR liée au secteur agricole ou agroalimentaire. Les services instructeurs ont pour consigne d’exiger systématiquement des justificatifs.

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