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La firme agricole, un modèle d’avenir

15/10/2018

Actus Agricoles

Concentration, régulation, évolution, l’agriculture face à la firme, tel était le thème du congrès de l’association française de droit rural cette année.

« Le modèle familial traditionnel consacré quasi unanimement par les grandes politiques du 20e siècle semble ne plus aller de soi. Une agriculture de firme est en train de s’installer dans le paysage agraire », a souligné François Purseigle en introduction du 34e congrès de l’AFDR à Bourges les 12 et 13 octobre 2018.

En 2010, ces très grandes exploitations (250 k€ et plus) représentent 10 % des unités du secteur et contribuent à 28 % de l’emploi, 30 % de la PBS et 45 % de la production agricole nationale. Entre 2000 et 2010, le nombre de ces très grandes unités progresse de 1,5 % par an, alors que l’ensemble des exploitations agricoles françaises décroît de 3 % par an sur la même période. Pourtant, les grosses structures ont mauvaise presse. La ferme dite des 1000 vaches, même si elle est unique, symbolise la protestation d’une grande partie du grand public mais aussi d’une partie de la profession agricole.

Co-auteur de l’ouvrage « le nouveau capitalisme : de la ferme à la firme », le sociologue a esquissé les contours de la firme de production agricole. Elle rassemble les grandes entreprises à dominante tant financière et spéculative qu’agricole ; les associations de producteurs ou de réseaux d’entreprises à la recherche de complémentarités et d’économies de gamme ; la firme commerciale de production qui s’appuie sur de nouveaux consortiums de sous-traitants et de nouvelles figures de gestionnaires de biens ; et des formes nouvelles d’intégration vers l’amont agricole. « Portées par de nouveaux acteurs de la production agricole (grandes familles d’entrepreneurs, fonds d’investissement, industriels, etc.), ces différentes figures de la firme agricole reposent notamment sur une multiplicité des unités de prise de décision, un recours plus important au salariat et un niveau d’investissement financier et technologique qui empiètent sur des secteurs non agricoles », a expliqué François Purseigle. Et fait notable, « 60 % d’entre elles sont des exploitations familiales qui ont réussi ».

Des freins à lever

Elles ont réussi malgré une réglementation qui peut parfois freiner l’entreprenariat. On pense évidemment au contrôle des structures qui, selon Fabien Barthe, avocat au cabinet Racine, gagnerait à se débarrasser du tabou de la taille pour regarder davantage la dimension économique des projets. Le marché sociétaire gagnerait également à être amélioré. La réforme en cours de la fiscalité devrait contribuer à lever quelques freins, a souligné Patrick Van Damme, expert-comptable et directeur de l’AS76. Il estime toutefois qu’il faudra « nécessairement aller plus loin encore dans le déploiement d’outils juridiques et fiscaux pour moderniser le statut de l’entreprise et de l’entrepreneur agricoles en empruntant des mécanismes courants dans le secteur industriel ou commercial ».

Julien Forget, avocat au cabinet Terrésa, membre d’AGIRAGRI, a lui aussi décrit un contexte législatif d’insécurité sociale. « Les dirigeants de la firme maîtrisent leurs cotisations sociales voire, les ont tout simplement éradiquées ! Bonheur total alors ? La réponse ne saurait être aussi simple, ne pas ou peu cotiser revient à ne pas (ou peu) s’ouvrir de droits et/ou à payer la Puma… Une approche cotisation/prestation doit être regardée en lien avec l’étude patrimoniale du chef d’entreprises (autres revenus, nature du patrimoine existant et projeté…). Et puis, ne faut-il pas s’interroger sur le fait de savoir si, par notre conseil avisé du socialement optimisé, nous ne venons pas de faire perdre à nos dirigeants de la firme : les baux dont ils étaient personnellement titulaires et mis à disposition de leur(s) société(s) d’exploitions ; la faculté d’être inscrits sur le registre des actifs agricoles et/ou le bénéfice de certaines aides…. Raisonner fiscal et/ou social en faisant abstraction, notamment du droit rural peut s’avérer redoutable pour l’avenir de la firme… et de son conseil… »

Des structures adaptables

Les firmes sont soumises aux mêmes normes fiscales, sociales, économiques, environnementales, etc. que les autres entreprises agricoles mais il ressort des débats de cette journée, qu’elles ont toutes les aptitudes à relever les défis de demain. Catherine Del Conti, Maître de conférences à l’Université de Nantes, a démontré que la firme est en effet adaptée au droit de la concurrence ; elle est aussi favorisée par la Pac depuis qu’en 2003, elle a pris un tournant libéral, note Jean-Baptiste Millard du Think-tank AgrIDées. Et de rappeler que, dès 1968, Sicco Mansholt, le premier commissaire européen à l’agriculture « plaidait pour des tailles d’exploitation de 80/120 ha en grandes cultures, 150/200 têtes pour les élevages, 40/60 vaches laitières… quand les 2/3 des exploitations avaient moins de 5 vaches à l’époque ! » Concernant la réforme en préparation, elle semble garder le même cap. La dégressivité et le plafonnement des aides à un certain nombre d’hectares ou de têtes pourraient avoir un impact, mais peut-être contrebalancé par un conditionnement des aides à l’actif car les firmes se caractérisent par une forte intensité de la main d’œuvre.

Quant aux exigences environnementales et sanitaires, seule la taille et l’organisation de ces nouvelles entreprises permet de les respecter. Elles vont même au-delà des exigences réglementaires, créant leurs propres normes, s’imposant des cahiers des charges toujours plus stricts pour fournir une production d’excellence, qu’elle soit destinée à l’industrie ou à la vente directe. Toutefois, la démonstration économique et scientifique ne suffit pas à rassurer les consommateurs et citoyens. « Leurs arguments parfois peu rationnels ou contradictoires avec leurs attentes en matière de sécurité alimentaire ou de respect de l’environnement, doivent être entendus, insiste Marie-Gabrielle Miossec, journaliste, auteur du hors-série de La France Agricole « Réponses à ceux qui veulent abolir l’élevage. Parfois pour expliquer, parfois pour contester les fausses vérités avancées, parfois pour faire évoluer les pratiques ».

 

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